Intelligence Artificielle, un nouvel outil dans l'industrie
Après avoir rendu possible l’extension de son corps avec la mécanique classique et la création d’engins roulants, volants et flottants ; l’homme a voulu aller plus loin en prolongeant ses capacités cognitives avec les ordinateurs.
Après avoir longtemps appartenus à l’univers de la science-fiction, le mythe de l’ordinateur autonome et capable de conscience serait-il en passe de se réaliser prochainement ?
On parle aujourd’hui d’intelligence artificielle, voire de machines supposées remplacer l’humain. Certains parlent de 30% d’emplois qui seront remplacés dans un avenir proche par des robots, d’autres prédisent l’apparition d’une singularité technologique, c’est-à-dire le moment où la machine pourrait devenir autonome. Les dernières avancées technologiques semblent aller dans ce sens (véhicules autonomes, assistants vocaux, …) même si nous sommes encore loin d’y arriver.
Un peu d’histoire…
En 1936, Alan Turing avec son essai « la machine de Turing », va initier la première génération d’ordinateurs. Il va en théoriser tout le potentiel au travers de ses écrits. C’est ici que vont naitre les concepts de cybernétiques et d’ordinateurs intelligents. À partir de cette époque, et de manière spéculative, on imagine qu’il serait possible de construire une machine autonome, voire pensante.
Les machines des générations suivantes, tels que l’ENIAC ou l’IBM 704, de par leur conception et leur vitesse de traitement, font faire des progrès au monde de l’informatique. Mais leurs systèmes électromécaniques à ampoules vont, pour un temps, ranger la promesse de l’IA et ses fabuleux potentiels dans les tiroirs des œuvres de la science-fiction.
En 1965, Gordon Earl Moore (un des père d’IBM), parle de doubler la capacité du nombre de transistors sur les microprocesseurs tous les ans. C’est ainsi que va naitre la fameuse « première loi de Moore », qui démontrera son exactitude de 1971 à 2001.
La vitesse de traitement des machines évolue au cours des années 70, avec l’apparition des premiers microprocesseurs tels que l’Intel 4004, et une nouvelle étape technologique est franchie. Puis, au début des années 1980, Richard Feynman évoque la possibilité de construire un ordinateur quantique, ce qui aurait pour effet de décupler la vitesse des calculs.
Les premières expérimentations ont lieu dans les années 90 avec de petits calculateurs expérimentaux dits quantiques, mais à partir de 2007, D-wave system annonce avoir construit une machine de 16 Quantum Bits. En 2019, l'entreprise a dévoilé un système à 2000 qubits.
Le seul problème reste encore la taille du dispositif et son encombrement. Aujourd’hui les projets concernant le sujet sont légions, certains prédisent l’avènement du tout quantique pour les années 2020. Quand cette machine sera opérationnelle, elle offrira une capacité de calculs inimaginable pour les machines classiques. De fait, l’IA trouverait un socle prometteur pour pouvoir se développer.
Programmes, Algorithmes, IA et Science-fiction
Dès les années 1940, Isaac Asimov, un des patriarches de la SF moderne, publie des nouvelles d’anticipation mettant en scène des histoires de robots. Asimov modernise ici le thème mythique et séculaire du Golem, et propose tout l’éventail des problématiques scientifiques et philosophiques se posant autour de ce sujet. Conscient de ce qu’il pourrait advenir des sociétés humaines lors de la création effective de telles entités, il développe les trois lois de la robotique, afin de concevoir un cadre comportemental aux machines autonomes.
Dès les origines, l’idée que l’on puisse construire des créatures artificielles pose une série de questions suscitant une certaine inquiétude. Le cinéma et la littérature nous donnent depuis, et de façon récurrente, des visions positives ou négatives sur le sujet :
- avec des IA destructrices nous promettant l’apocalypse tel le SKYNET du film Terminator,
- ou bien des IA bienveillantes avec le film IA de Spielberg, avec cette machine qui se prend pour un petit garçon.
En Janvier 2015, un groupe de personnalités du monde industriel et scientifique, dont font partie Elon Musk et le défunt Stephen Hawking, rédigent une lettre ouverte à destination du monde entier afin de mettre en garde l’humanité face au danger que pourrait représenter une IA devenue incontrôlable.
Ce texte pointe du doigt ce que l’on appelle les armes autonomes, c’est-à-dire des drones intelligents capables d’identifier un ennemi et de prendre seuls la décision de le détruire ou non. Pour les cosignataires de la lettre, il s’agit là d’une dérive dangereuse de l’utilisation de l’IA dans le domaine militaire :
"Ce ne serait qu'une question de temps avant que ces armes n'apparaissent sur le marché noir et dans les mains des terroristes, de dictateurs voulant asservir leur population ou de seigneurs de guerre voulant perpétuer des épurations ethniques".
En ce début de XXIe siècle, l’IA fait donc partie de l’actualité et les rapports et études pleuvent sur les conséquences à venir dans le secteur industriel, et les sociétés.
Demain un robot « intelligent » ?
Dans les années 50, Von Neumann, l’architecte des ordinateurs modernes, a prédit la « singularité technologique », c’est-à-dire le moment où la machine serait en mesure de dépasser l’homme. Nous sommes à la veille de mettre au point les ordinateurs quantiques, et donc de posséder une puissance de calculs qui permettrait, selon certains futurologues, de réaliser ce basculement. Mais en fin de compte l’intelligence artificielle c’est quoi ?
Définition : « Ensemble de théories et de techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l'intelligence humaine. » - LAROUSSE
Schéma de l'architecture de Von Neumann
L’intelligence d’une machine n’est actuellement que l’extension d’une forme de l’intelligence humaine, qui se caractérise par le fait d’être doué en mathématiques et en logique. Seulement voilà, depuis un certain temps maintenant on s’est aperçu que l’intelligence humaine ne se résumait pas à une seule forme d’intelligence mais à plusieurs combinées entres elles ! Le mot intelligence s’écrit maintenant au pluriel. Ainsi il y a des intelligences émotionnelles, artistiques, de l'espace, etc. Et il serait vain de les comparer. Ce qui permet d’animer un être humain, c’est son libre arbitre, et la conscience qu’il a de soi.
Luc DE BRABANDERE, auteur de l’ouvrage « Homo Informatix », va dans le sens d’une intelligence qui ne pourra jamais être artificielle :
« La véritable IA n'existera jamais, car le monde est inconnaissable. C'est l'histoire du philosophe à qui l'on demande : "Que pensez-vous des Espagnols ?" Et qui répond : "Je ne sais pas, je ne les connais pas tous !" Il n'est pas rationnel d'être à 100% rationnel, or un ordinateur est à 100% rationnel. Ce qui intervient dans la pensée inductive, comme l'intuition ou l'imagination, n'est pas programmable. »
L’intelligence artificielle se limite à ce qu’elle sait faire, elle n’est rien d’autre qu’un outil très perfectionné, véritable extension de l’esprit humain.
L’existence d’un robot que l’on pourrait qualifier d’« intelligent », au même titre qu’un être humain, ne serait donc qu’un rêve inatteignable.
L’IA, un outil, plus perfectionné que les autres ?
L’IA se déploie aujourd’hui dans l’industrie sous la forme de ce que l’on appelle l’industrie 4.0, avec l’automatisation et l’autonomie des chaines de production, et l’interopérabilité des machines. Comme à chaque période de transition technologique, cela suscite une certaine inquiétude car cela va modifier la donne en matière d’emploi. Certains rapports évoquent la substitution de 9% des emplois en France (source : OCDE) voir 47% aux États-Unis (source : Frey & Osborne). Cependant, certaines activités seront difficilement remplaçables, car un opérateur humain sera toujours nécessaire pour garder le contrôle d’une ligne de production ou effectuer le contrôle final de certains types de pièces.
Placer des cartons dans des rangées d’étagères, cela reste simple et automatisable. La forme d’« intelligence » nécessaire à cela restera fondamentalement logique et mathématique. À noter qu’il faudra toujours plusieurs techniciens et manutentionnaires pour veiller au bon fonctionnement de l’ensemble, et intervenir en cas de panne. De même on automatise des supermarchés avec des caisses rapides, mais l’intervention d’un hôte de caisse reste nécessaire pour en assurer le bon fonctionnement, en cas de défaillance.
L’IA tente d’investir de nouveaux domaines jusque-là réservés aux humains. C’est le cas par exemple de l’analyse visuelle dans le secteur de l’imagerie médicale. L’IA est ainsi accueillie par la profession comme un nouvel outil, plus perfectionné que ceux actuellement disponibles, et étant une aide à la décision supplémentaire permettant au radiologue d’affiner son diagnostic.
Dans le domaine de la RH, L’Oréal a mis en place une IA de recrutement pour ses futurs collaborateurs. Le but recherché est de pouvoir pallier à la quantité de candidatures reçues en analysant les profils par l’intermédiaire d’un chatbot. Des questions qui se veulent objectives (disponibilité, niveau d’études, …) permettent alors d’orienter la candidature vers le poste adéquat. Néanmoins, la décision de recrutement reste toujours à l’approbation d’un recruteur « humain ».
Pour l’heure l’IA est nouvel un outil informatique permettant de remplacer l’humain pour certaines tâches simples, ou l’aider dans la prise de décision. Cependant, avec les avancées prévues dans ce domaine et l’attribution toujours plus grandes de tâches à l’IA, il conviendra de légiférer afin de mettre en place des chartes de bonne conduite et d’éviter certaines possibles dérives : armes autonomes, discriminations à l’embauche, …
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